Mercredi 2 décembre :
Journée à plat. Je suis malade. Je n'irais pas à Vicente Lopez...
Journée à plat. Je suis malade. Je n'irais pas à Vicente Lopez...
Les 40 ans de Balada para un loco, événement organisé par le ministère de la culture de la ville de Buenos Aires qui devait se dérouler le vendredi 27 novembre a été reporté au mercredi 2 décembre pour cause de pluie. L'amphithéâtre Eva Perón du Parque Centenario fraîchement rénové en juin dernier n'était pas complet. Avec 1620 places assises et une scène de 18m x 12m et tout ce qu'il faut au niveau lumière et son. Comme souvent ici, pour un événement gratuit, il faut retirer les places à l'avance.
Cette soirée anniversaire se fait en hommage à cette Balada para un loco qui ne remporta pas le prix d'un Concours organisé au Luna Park il y a 40 ans. Aujourd'hui, personne ne se souvient plus du thème qui remporta le premier prix mais uniquement de cette Balada para un loco, fruit de l'imaginaire et d'une vision nouvelle qui a fait le tour du monde, grâce aux talents réunis de la poésie d'avant-garde d'Horacio Ferrer, avec la musique non moins rebelle d'Astor Piazzolla par la voix d'Amélita Baltar et qui a ouvert tant de chemins en marquant l'histoire du genre.
Présentée par l'incontournable Oscar del Priore, cette soirée a été retransmise en direct par la radio la 2x4, unique radio à ne diffuser que du tango. Tout commença par une ouverture de rideau épique puisqu'il fit tomber quelques micros qu'il fallut relever dès le début de la première des quatre saisons de Piazzolla magnifiquement interprétées par l'Orchestre de la ciudad de Buenos Aires, soit 30 musiciens, dirigés d'abord par Raúl Garello puis par Juan Carlos Cuacci qui en ont assuré les arrangements. Leonardo Ferreyra vibre et nous fait vibrer avec ses parties de violon solo qu'il joue sur le bord de sa chaise, presque debout parfois autant que Julio Pane dans des solos de bandonéon pendant lesquels les autres musiciens en profitent pour remettre les pinces à linge qui leur tiennent les partitions, plein air oblige. Les moustiques virevoltent autour de la scène, attirés par la lumière, pendant que les grillons du Parque Centenario servent de bourdon musical.
Seule ombre au tableau, l'intervention à la deuxième et à la quatrième saison d'un couple de danseurs dont j'ai oublié le nom, au mauvais goût certain, à vous gâcher la musique - elle agressive, lui macho à souhait, moustache de rigueur, dans des chorégraphies agressives, aux mouvements hachés, mal exécutés, sans aucune connexion. Un supplice infligé au public. Dommage !
La musique nous emporte, dans sa version élargie à cet orchestre soutenu par la ville depuis 1980, avec Hernan Posseti au piano, aux contrebasses Marisa Hurtado enceinte jusqu'au dent et Juan Pablo Navarro, croisé si souvent depuis le début de ce séjour. Aux bandonéons : Julio Pane, Federico Pedreiro, Carlos Corrales, Osvaldo Montés et Mariano Cigna.
Et dire qu'aujourd'hui ce serait aussi l'anniversaire d'Osvaldo Pugliese ! Buenos Aires regorge de tango et de nuits où l'on ne dort pas.
Ensuite, le chanteur Marcelo Tomassi fera sienne les paroles d'Horacio Ferrer : El gordo Triste (musique de Piazzolla), puis Viva el Tango (musique et direction de Raúl Garello) puis la Milonga del Trovador (musique de Piazzolla dont la version de Jairo est la plus connue).
Horacio Ferrer apparaît, toujours élégant et calme qui nous régalera littéralement de ses mots choisis dans son dit-chanté si particulier, s'aidant en cela de ses majestueuses mains, si vivantes, qu'elles disent avec lui Chiquilín de Bachín avec son texte introductif des plus émouvants sur ce gamin qui vend ses roses autour des tables du restaurant. Puis Preludio para el año 3001 et son Mi viejo Piazzolla, mi mágico Astor, en hommage à son ami et complice Piazzolla dont il finit par "tocas con las teclas de mi corazón" (tu joues avec les touches de mon cœur), accompagné par Tripiana au piano sur la musique d'Oblivión et en prélude une musique écrite par Daniel Piazzolla, le fils d'Astor.
Des applaudissements à tout rompre, tant l'émotion et l'affection sont grandes pour cet homme de lettres, également homme de scène. Il poursuit pour notre plus grand plaisir en racontant comment il a écrit le thème suivant, alors que Piazzolla lui laissa une cassette avec une nouvelle musique et qu'il neigeait sur l'île saint-louis où il vivait : Será que estoy llorando ! Effectivement très émouvant et à pleurer ! Une vague d'applaudissements déferle, c'est ahurissant. Puis il remercie ensuite avec une grande émotion qui lui serre la gorge, les 3 médecins qui lui ont sauvé la vie cette année ainsi que "la femme dont je suis le mari". On voudrait qu'il ne quitte pas la scène.
Un hommage à Antonio Agri, celui qui fût dix ans le complice d'Astor Piazzolla au violon, sera également rendu grâce à son fils, Pablo Agri également génie du violon, dans un Oblivión très sensible, magnifique, tout en nuances, en trio avec Gabriel de Lio à la basse électrique et Marisa Hurtado à la contrebasse. Ils joueront ensuite un autre thème de Piazzolla en quintet avec Julio Pane au bandonéon et Hernan Possetti au piano. Avec le vent, tout s'envole et le pianiste vient secourir Pane qui ne peut quasiment plus jouer et un technicien remet à l'envers les partitions de Gabriel... ce qui perturbe le début du thème, pourtant magnifique. Pablo est inspiré, bien planté sur ses jambes, sur lesquels il se balance comme avant lui son père, joueur et trublion.
Oscar del Priore nous informe que Anibal Arias à la guitare et Osvaldo Montes au bandonéon vont être à la retraite : ils l'ont bien mérité les deux petits vieux.
Puis l'Orchestre de Tango de la ciudad de Buenos Aires revient, cette fois-ci dirigé par Nestor Marconi qui a assuré les arrangements, joue Libertango puis un pot-pourri de divers thèmes de Piazzolla. Pour cela, il commence par un brillant solo de bandonéon, puis dirigera laissant la place à un très sensible solo de bandonéon de Raúl Garello qu'il invite.
La fin approche avec la présence rayonnante d'Amélita Baltar, pas toujours appréciée par tout le public mais pourtant très professionnelle et émouvante, aux côtés de l'orchestre, toujours dirigé par Nestor Marconi. Elle chantera la Milonga del anunciacion issu de l'Operita María de Buenos Aires, puis la última grela et Balada para mi muerte dont elle avoue que c'est son thème préféré. Et on comprend pourquoi avec cette force combinée des paroles et de la musique.
Puis le clou final présenté par Diego Rivarola, directeur général de la musique de Buenos Aires pour une version surpuissante de la Balada para un loco, avec un récitatif où le vent se lève et un bis pour lequel Horacio Ferrer revient sur scène. Le public est debout, absolument conquis sous la pleine lune qui illumine tout Buenos Aires.
Vers la fin du spectacle, mon grand maigre apparaît, après la fête d'un des ateliers qu'il dirige... Quel élan envers lui. Nous nous faisons la bise, nous sommes en public et nous faisons bien Ouf ! Nous irons saluer Lulú, il cherche des excuses pour s'éclipser... Il croisera beaucoup de gens qu'il connaît bien sûr. Je me mets en retrait, je pars même pour voir Pablo Agri qui a déjà disparu, nous verrons Horacio Ferrer, très content de voir R, vraiment. Je crois qu'il ne m'a pas reconnu. Je verrais aussi Karina Keorlegui, très belle brune. Claudia étant en vélo, ouf, nous pouvons partir tous les deux en voiture, prenons un verre en plein centre, près de l'Abasto... avant qu'il ne me ramène à San Telmo. Chaque instant est intense !!! Sans rien faire d'extraordinaire, juste être ensemble nous suffit !
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